Kindoki Tech,
« Bien plus qu’un système techno fétichiste, il se définit ainsi comme un objet de renouement total de l’africain et ses ancêtres. Une véritable machine identitaire ».
Dans une ville à forte croissance démographique, nombreux sont les défis qui se présentent et qui exigent d’être relevés. Partant de cette perspective, l’institut français de Kinshasa et le Goethe institut ont organisés conjointement du 11 au 13 mai 2017, Kinshasa 2050. Un événement pluridisciplinaire d’échange ; d’expression et de projection sur ce que ressemblera Kinshasa en 2050.
Après les mots de la commissaire Nadine Siegert, en la date du 11 mai, l’exposition a été déclarée ouverte. Avec un total de 7 artistes exposants congolais. Dès l’entrée de l’espace à droite, une maquette futuriste de l’avenue ex-24 novembre est présentée. En fonçant vers un petit local en avant, un engouement total tourne autour de l’expérience sur la réalité virtuelle. À l’intérieur de la salle d’exposition, sont exposées, engins ou cabine spatiale ; canapé intelligent ; Plaque des avatars en CD ; en chutant par l’installation de Kindoki Tech, qui d’ailleurs, fait l’objet de cet article critique. L’espace a l’air d’un fab lab à la première vue, de e quoi nous faire voyager entre ciel et terre, dans un futurisme représenté. Un futurisme plutôt à l’Africain dont l’artiste Hilary Balu a voulu marteler à travers son Kindoki Tech. Qui n’est autre qu’un système permettant à l’utilisateur de faire un voyage astral virtuel, télé enregistré à temps réel à l’aide d’une tablette ou d’une console.
L’installation met en scène deux sculptures en face à face. La première, est une sculpture taillée en bois, dont la tête est légèrement tournée vers le haut, en lunette avec les yeux qui brillent comme du cristal. Elle tient une lance sur sa main droite et une tablette avec sa main gauche, posée sur le ventre. Son corps, est couvert de touches de claviers. L’auteur l’intitule Nkonde virtuel ou le fétiche à clavier. Un objet en aluminium est autour et au-dessus de sa tête. On dirait une antenne et un radar qui permet de réceptionner les informations. Elle reste cependant connectée à un casque, qui se trouve juste devant elle à travers une fibre de type électronique. Le casque, est aussi composé d’une antenne en spirale, couvert des perles africains ; du raphia et d’une bande transparente en plastique pour les yeux.
L’installation prend alors son sens. En y mettant le casque, quelqu’un pourra entrer en contact directement avec le monde astral. Le voyage est alors télé enregistré par Nkonde virtuel. Le contenu peut être aperçu sur la tablette portée par cette dernière ou quiconque.
Revenons dans l’histoire africaine, le peuple Kongo faisait usage de Nkonde Nkisi. Un fétiche qui couvrait à la fois le rôle protecteur et celui d’un esprit anthropomorphe. Couvert de clous sur son corps, il tenait également une lance et un miroir sur son ventre, dont toute la charge magique était enfermée. Dès par sa forme, Nkonde virtuel, possède certaines similarités avec le Nkonde Nkisi, fétiche Kongo. L’artiste a voulu juste le faire évoluer tout en réinventant son rôle. Le faisant alors adapter au temps et à ses exigences.
Nombreux sont ceux qui défendent la thèse selon laquelle, le frein à l’évolution du continent, est dû à une acculturation profonde, causée en grande partie par la colonisation. Qui à travers sa christianisation a occasionné certaines choses, dont le pillage massif des objets d’art africain. À juste titre détenteur de pouvoir et de l’identité tributaire. La force de l’Inde ou de la Chine, ne serait-ce pas attribuée en partie à leurs forts attachements aux traditions ? Eux qui ont accepté la mondialisation, sont également restés attachés à leurs traditions, perpétrées de génération en génération. L’artiste veut donc renouer avec les ancêtres, nos aïeux. Un retour à l’authenticité envisagé, tout en y associant les nouvelles technologies. Kindoki Tech, est donc le médium par excellence, qui associe le Kindoki (sorcellerie) et la technologie, pour l’avancée du continent.
Avec un tel apport, le progrès du continent semble être effectif. Les mêmes forces surnaturelles inspirant jadis nos ancêtres, seraient présentement en train d’inspirer les générations futures. Les connaissances acquises spirituellement et télé enregistrées, pourront être visualisées et partagées. Ne serait-ce pas la fin de la relation verticale, à un sens qui existe entre le Sud et le Nord.
Kindoki Tech est bien plus qu’un système techno fétichiste. Il est un système de renouement total de l’africain avec ses ancêtres. Une véritable machine identitaire, assumant un rôle de catalyseur. Favorisant ainsi le développement de grandes idées et innovations, adapté au modèle africain pour un développement personnel, durable et intégral.
COLON ASSANY
Critique d’art junior
Kinshasa, RDC