Une vingtaine de danseurs de Kinshasa ont présenté au public le fruit de leur apprentissage lors de dix jours d’ateliers intitulés “Run like a girl” (ndlr, cours comme une fille en français), à l’École Belge de Kinshasa. Cet événement s’est tenu à la Maison de France le 16 décembre 2024, marquant ainsi la clôture de cette session de formation.
En décrivant brièvement le travail accompli lors des ateliers, Wendy Jehlen, chorégraphe américaine et directrice de la compagnie Anikaya Dance Theater, a défini le cadre pour présenter certaines étapes des exercices que les danseurs ont dû réaliser de manière cohérente.
“Durant les ateliers, nous avons travaillé sur le portrait et la confiance en soi à travers le mouvement du corps. Nous avons également abordé les différents clichés qui reflètent ce que les femmes vivent dans la société actuelle, notamment à travers la danse”, a-t-elle exprimé.
Comme l’indique la thématique des ateliers, les questions de genre ont été mises en lumière de manière particulièrement significative. Chaque séance de formation a donné lieu à des échanges enrichissants entre les danseurs et les formateurs, favorisant une exploration profonde des émotions liées au genre.
À la fin de ces séances, les danseurs ont réussi à traduire sur scène la complexité des ressentis d’une femme qui souffre, supporte et endure des épreuves, tout en étant souvent réduite au silence dans la société. De plus, ils ont incorporé des éléments de leur propre expérience, créant ainsi une performance collective qui résonne avec des luttes universelles, renforçant ainsi le message d’empathie et de solidarité.
“Nous avons mené une collecte et interrogé les danseurs pour comprendre le véritable sens de certaines expressions en lingala. Par exemple, que signifie ‘aimer comme une femme’ ou ‘supporter comme une femme’ ? Il est essentiel de découvrir ce qui se cache derrière ces mots. Les femmes endurent souvent la souffrance tout en identifiant ses causes. Pourtant, lorsqu’un homme commet des actes similaires, on ne dit rien, on l’encourage. En revanche, une femme sans homme est critiquée et stigmatisée par la société”, a déclaré Marcel Gbeffa, chorégraphe béninois et animateur des ateliers.
À l’issue de la restitution, les deux formateurs ont partagé leurs vœux de satisfaction, témoignant de l’excellence de l’organisation de ces ateliers. Ces rencontres ont non seulement favorisé un enrichissant échange interculturel, mais ont également célébré la cohabitation, la complémentarité et l’acquisition de nouvelles compétences en danse. Leur enthousiasme était palpable, reflet des moments précieux vécus aux côtés des danseurs participants lors de leur séjour à Kinshasa, qu’ils garderont en mémoire comme une expérience inoubliable.
Les danseurs ne pouvaient pas s’empêcher de parler de la valeur ajoutée qu’ils ont acquise lors des ateliers. Ils se sentent très reconnaissants envers les deux animateurs avec qui ils ont rapidement noué des liens. De plus, ils sont heureux d’avoir bénéficié d’une expérience enrichissante qu’ils pourront mettre en pratique dans leur carrière professionnelle. Leur perspective sur les questions de genre a également changé.
“Après 10 jours d’ateliers, je suis ressorti grandi artistiquement et humainement. Nous avons abordé plusieurs clichés sociétaux ainsi que des questions relatives au genre. Cela nous a permis de réfléchir à comment travailler et vivre ensemble en harmonie, sans écraser l’un l’autre. C’était bénéfique pour nous”, a confié Ibrahima Sidibé, danseur interprète burkinabè et participant aux ateliers.
Satisfaite d’avoir participé aux ateliers, Naomie Kolefuka, danseuse interprète, s’est exprimée en ces termes : “Ces ateliers m’ont beaucoup appris sur le thème de la femme sous diverses facettes. Ils m’ont également motivée et ouvert les yeux sur ma place et sur la nécessité de faire valoir mes droits dans la société. J’ai aussi compris que la femme ne doit être ni en dessous ni au-dessus de l’homme, mais qu’il doit y avoir égalité entre les deux sexes.”
En tant que représentante de l’ambassade des États-Unis à Kinshasa lors de cette activité de restitution, Idie Irele a démontré son sens émotionnel pendant la performance des danseurs. Elle en a profité pour réaffirmer le soutien indéfectible du gouvernement américain envers de telles initiatives. D’après sa perception, au cours de l’atelier, les danseurs ont abordé les enjeux liés au genre dans les contextes familial, éducatif et artistique.
“Lorsque j’ai assisté à la performance, j’ai pu ressentir et percevoir les émotions qui s’en dégageaient. C’était véritablement captivant. À l’ambassade des États-Unis à Kinshasa, nous sommes profondément engagés et nous nous efforcerons de soutenir des projets similaires qui rassemblent des jeunes, hommes et femmes, pour discuter des questions de genre. Je suis fière de soutenir ce programme, tout comme le gouvernement américain, car il traite d’un enjeu crucial : l’égalité entre les sexes”, a-t-elle déclaré.
Plusieurs pays, tels que le Bénin, le Burkina Faso, le Brésil, le Japon, les États-Unis et le Botswana, ont tiré profit de ce projet, qui inclut actuellement la République Démocratique du Congo grâce au soutien de l’ambassade des États-Unis.
« Run Like A Girl est un atelier né d’une campagne publicitaire de 2014, où des expressions comme “courir comme une fille”, “se battre comme une fille” ou “jeter le ballon comme une fille” visaient à montrer que les filles peuvent accomplir les mêmes choses que les garçons. Je me suis demandé, avec étonnement, pourquoi on ne dirait pas que les garçons devraient agir comme des filles pour que la société soit équitable. C’est cette réflexion qui m’a poussée à lancer le projet Run Like A Girl », explique Wendy Jehlen, directrice de la compagnie Anikaya Dance Theater des États-Unis.
Depuis 2017, le projet “Run like a girl” est porté par la compagnie Anikaya Dance Theater (USA). Ce vaste projet a déjà touché de nombreux pays à travers le monde. Du 6 au 16 décembre 2024, une série d’ateliers a été organisée, réunissant une vingtaine de danseurs sous la direction de Wendy Jehlen et Marcel Gbeffa, deux chorégraphes de renommée internationale.
Ces ateliers ont été possibles grâce à la collaboration de la compagnie Jacques Bana Yanga et d’Anikaya Dance Theater, avec le soutien de l’Ambassade des États-Unis à Kinshasa.
Masand Mafuta