“Les langues qui se délient” tend vers sa fin mais continue à faire vibrer les scènes lushoises. Ce vendredi 11 juillet 2025, deux moments forts ont marqué la quatrième journée de : le talk artistes qui s’est déroulé au Centre d’Art Waza, avec comme intervenants trois metteurs en scène : Jenovic Mwanza, Tinah Way et Wedou. La mise en lecture de “Une Route à Prendre”, une pièce de théâtre d’André Mejors, mise en scène par Wedou Wetungani, a également clôturé cette journée.
Réunies sous le thème “Créer dans la vie institutionnelle : Stratégie artistique en RDC, entre Kinshasa et Lubumbashi”, les discussions au Centre d’Art Waza ont été riches en idées, contribuant à la réflexion sur la condition des artistes en République Démocratique du Congo et les enjeux de la vie institutionnelle pour les artistes congolais, notamment dans le domaine du théâtre à Kinshasa comme à Lubumbashi.

Concernant la vie institutionnelle, Jenovic Mwanza a interrogé l’avenir des institutions culturelles et souligné que les artistes lushois créent des fabriques culturelles autonomes, bricolent des économies alternatives et mènent des combats sociaux. Tous ces défis rencontrés contribuent à renforcer leur engagement et poussent les artistes à donner le meilleur d’eux-mêmes.
“il faut détourner les contraintes, réinventer les espaces, s’approprier l’économie : voilà le triptyque qui guide les artistes de Lubumbashi. Leur leçon d’audace et de résilience résonne comme un appel à repenser les modèles établis. Et si l’avenir de l’institution culturelle était une absence assumée ? À Lubumbashi, les artistes transforment le manque d’institutions en force. Bien que cette liberté ait un prix (ndlr, dépendance aux fonds étrangers, fractures numériques, risque de récupération, perte de données, droits d’auteur) ”, a-t-il déclaré.

Wedou, quant à lui, a soulevé le point crucial de la créativité dans l’art congolais. “Le vide institutionnel gangrène la situation des artistes. Bien qu’il existe des mécanismes mis en place par l’État, certains artistes ne comptent pas sur les subventions étrangères ou étatiques. L’artiste congolais crée, par son imagination, des associations pour générer des fonds, permettant de réaliser des tournées et autres productions.”
En parallèle à ce problème institutionnel, la question des espaces et infrastructures pose un sérieux défi. La plupart des artistes doivent recourir à des opportunités venant de l’étranger pour créer.

“Les artistes ne doivent pas attendre les subventions pour évoluer. Les étrangers nous doivent quelque chose. Dans ce vide institutionnel, les artistes congolais manquent d’espaces pour se produire et réaliser un travail de qualité. L’infrastructure fait défaut, et l’État ne met pas à disposition des espaces de théâtre, obligeant les artistes à se débrouiller par leurs propres moyens, voire à recourir aux subventions étrangères ”, a révélé Tinah Way, oratrice du jour.
Ce thème fort évoque également le processus de transmission de connaissances culturelles. Tinah Way s’engage dans cette lutte pour permettre aux jeunes de s’ouvrir au monde artistique et d’exprimer leur talent.
Au-delà de cet échange qui a transformé le Centre d’Art Waza en un lieu de réflexion sur des questions sensibles dans l’univers artistique congolais, l’ambiance s’est poursuivie au Bureau de la Wallonie-Bruxelles, où la pièce de théâtre “Une Route à Prendre”, d’André Mejors, a été mise en lecture par Wedou Wetungani.
André Mejors est un artiste camerounais engagé dans l’écriture de pièces de théâtre. Il a souhaité partager son savoir dans le cadre de la promotion de l’art en intégrant son œuvre à l’événement “Les langues qui se délient”.
Rappelons que “Les langues qui se délient” est une activité en prélude au FESTILU, une initiative mise en place par le collectif La Seringu’art et le Kiosque Littéraire, avec le soutien de grandes institutions culturelles locales telles que l’Institut Français (Halle de l’Étoile de Lubumbashi), le Centre d’Art Waza, le Centre d’Art Biasasa, le Centre d’Art Picha et le Bureau Wallonie-Bruxelles de Lubumbashi.
Cécile MULUMBA