Après Atalaku (2013) et Examen d’Etat (2014), le réalisateur congolais Dieudo Hamadi livre un portrait magistral d’une mère-courage qui tente de rendre justice aux femmes et aux enfants victimes des violences de guerre en RDC.
Dieudo Hamadi est un enfant du Cinéma du Réel et, une fois de plus, il en incarne l’esprit. Avec Maman Colonelle, son dernier long métrage présenté en compétition internationale, à Paris, il reçoit le Grand prix du Cinéma du Réel 2017, rapporte une dépêche de Radio France Internationale. C’est la première fois qu’un film africain obtient ce niveau de récompense au « Réel » depuis sa création en 1979. Et c’est le quatrième film du réalisateur congolais sélectionné dans ce festival documentaire à Paris.
La fibre humaniste et l’entraide sont à la mode chez les cinéastes africains. Et Maman Colonelle, le nouveau documentaire de Dieudo Hamadi, a touché le public du Cinéma du Réel 2017, qualifié de «Magnifique ».
« Merci pour votre engagement », lui a dit un spectateur très ému. Parallèlement, « Félicité », la fiction d’Alain Gomis primée à Ouagadougou et à Berlin et qui vient de sortir en salle en France, montre aussi une mère-courage qui se bat pour son fils. Un film que le cinéaste congolais a soutenu en acceptant de servir de guide au Franco-Sénégalais dans les rues de Kinshasa.
Soucieux des dysfonctionnements des institutions en RDC, ce pays continent en proie à toutes les convoitises, Dieudo Hamadi qui avait filmé caméra au poing le déroulement d’une campagne électorale dans « Atalaku » (2013) puis les difficultés d’accès au baccalauréat pour les enfants pauvres dans « Examen d’Etat » (2014), met cette fois-ci magistralement en scène une policière d’exception qui vole au secours des enfants et femmes victimes de violences.
Lutte contre les violences sexuelles
Montée à bord d’un bateau cargo qui appareille pour Kisangani, Colonelle Honorine a la carrure qu’il faut pour s’imposer face aux dockers qui chargent un à un ses colis. L’œil aguerri, elle surveille présentement son congélateur qui, au bout des cordages, descend lentement dans la soute du navire décati. L’appareil dûment arrimé, elle prend soin encore d’ajouter le H manquant à son prénom inscrit sur le flanc… Puis elle traverse les cales où des passagères se disputent les places sur des nattes étalées au sol. La policière remet naturellement de l’ordre. Et arrive à temps en proue pour observer, en contrebas, l’hélice qui fait bouillonner l’eau huileuse. Attaché au bastingage, un drapeau congolais claque au vent. A l’horizon, le fleuve Congo majestueux.
Dès le début du film, on marche au pas de Maman Colonelle. Au sein de la police congolaise, elle a assuré pendant quinze ans la protection de l’enfance et la lutte contre les violences sexuelles au Sud-Kivu, à l’Est de la RDC. Et quand on lui a appris sa mutation de Bukavu à Kisangani, elle a tenu à rassurer les femmes qu’elle a soutenues toutes ces années et qu’elle s’apprête à quitter. « Ça va aller ! », leur a-t-elle dit d’une voix posée, et cela sans rien laisser paraître de l’émotion qui l’étreint. « Si tu pars, qui va nous aider ? », lui ont-elles répondu en chœur.
Le dispositif de tournage est des plus simples. Comme dans ses précédents films, Dieudo Hamadi, caméra à l’épaule, fait le cadre et imprime lui aussi le mouvement dans les rues chaotiques ravagées par plusieurs décennies de guerre.
Le potentiel