De Bandal à Lingwala, du 10 au 14 décembre, la 12ᵉ édition du Festival International de l’Acteur (FIA) s’est tenue à cheval entre les espaces Ntongo Elamu, Mutombo Buitshi et Académie des Beaux-Arts de Kinshasa. Ce fut un moment de découvertes, intense en émotions, placé sous le thème « Voix, Corps, Dignité ». Un rendez-vous consacré à la culture et au jeu d’acteur, à travers le théâtre, la lecture et des ateliers.
Plusieurs auteurs ont défilé sur scène pour donner vie, par le théâtre, à des textes tels que Bongolatrice, Clôture d’amour, Reporting of Kinsangani, Purgatoire et bien d’autres.
L’organisation du FIA 2025 à Kinshasa n’a pas par ailleurs été évidente. Elle a suscité des sentiments contrastés : de la joie, mais aussi de la colère et du regret face au manque d’accompagnement d’une politique culturelle digne d’un événement de cette envergure.
« Le problème ne réside pas dans le manque de moyens, mais dans un choix politique : organiser un événement d’une telle envergure revient à mesurer presque physiquement le vide laissé par l’absence d’une politique culturelle structurée et ambitieuse. Si ces manifestations deviennent exceptionnelles, presque héroïques, c’est parce que l’État a déserté le champ culturel. Ce n’est pas un manque de moyens, c’est un choix politique », a déclaré Cajou Mutombo, directeur du festival.
Avant d’ajouter : « L’absence d’une vision culturelle forte n’est pas une négligence, c’est un renoncement. En reléguant les arts au second plan, les institutions renoncent à produire du sens, à construire un imaginaire collectif et à porter un récit commun capable de rassembler. Ce vide est politique, et il fragilise durablement le tissu social. »
Animé par un sentiment de colère, Cajou Mutombo a précisé que chaque réussite culturelle restera le reflet d’un abandon plus large tant que l’État congolais ne s’impliquera pas réellement.
« Après un tel événement, je ne ressens donc pas de soulagement, mais une colère lucide. La culture prouve qu’elle tient encore debout, mais elle le fait contre les institutions, et non avec elles. Et tant que cette réalité ne sera pas assumée, chaque réussite culturelle restera le symptôme d’un abandon plus large », a-t-il souligné.
Comme toute œuvre humaine, le FIA 2025 a rencontré des difficultés. Selon son directeur, certaines auraient pu être évitées avec l’appui de l’État. Le manque de soutien a notamment limité les ambitions, en réduisant la participation de compagnies étrangères.
On note également l’absence flagrante de plusieurs acteurs reconnus de Kinshasa, une remarque adressée au directeur, qui n’a pas nié ce constat. Il a rappelé avoir déjà vu Roch Bodo sur scène lors des éditions précédentes.
« À l’exception de Roch Bodo, que j’avais déjà vu sur scène et qui avait participé à des éditions précédentes, les autres noms que vous mentionnez sont avant tout des acteurs de cinéma plutôt que de théâtre. Cela explique en partie leur absence cette année », a confié Cajou. Avant d’ajouter : « Cela dit, leur talent est incontestable, et je suis convaincu que dans les prochaines éditions, ils pourront être pleinement associés au projet, car le FIA est une fête ouverte à tous les arts et à tous les acteurs. »
Malgré les difficultés, le FIA 2025 a marqué les esprits par des activités originales et apaisantes, offrant savoir et bien-être.
Yves Muetu
